Partie 1 : Le bonheur. Chapitre 3
La pratique pour transformer notre état de vie [3.3]
3.3 Le Gohonzon n’apparaît que dans la seule foi
Dans un cours sur l’écrit de Nichiren intitulé La composition du Gohonzon, le président Ikeda aborde le sens profond de la disposition graphique du Gohonzon et explique que l’objet de vénération inscrit par Nichiren a marqué une nouvelle ère dans l’histoire du bouddhisme. Il souligne également qu’on ne peut accéder au pouvoir bénéfique du Gohonzon que par la foi.
Le Gohonzon existe pour l’éveil et le bonheur authentique de toutes les personnes vivant à l’époque de la Fin de la Loi jusque dans l’avenir éternel.
Le vœu de Shakyamuni et le souhait de tous les bouddhas du passé, du présent et du futur sont de permettre à tous les êtres vivants de parvenir au même éveil que celui des bouddhas. Nichiren fut le premier à révéler l’objet de vénération, ou le Gohonzon, pour actualiser ce vœu, en le concrétisant sous la forme d’un « grand mandala ». (Écrits, 839)
Il déclare : « Ce mandala n’est en aucun cas mon invention. » (Écrits, 839) Le Gohonzon, nous assure-t-il, n’est pas une création arbitraire de sa part, mais l’objet de vénération représentant les cinq caractères de Myoho-renge-kyo auxquels s’éveillèrent le bouddha Shakyamuni, assis dans la Tour aux trésors du bouddha Maints-Trésors, et tous les bouddhas qui constituaient ses émanations. En d’autres termes, le Gohonzon est une représentation parfaite de « la réalité ultime de tous les phénomènes1 » et des principes fondamentaux de « la possession mutuelle des dix états (ou dix mondes)2 » et des « trois mille mondes en un instant de vie3 », lesquels furent élucidés au cours de la Cérémonie dans les airs4 décrite dans le Sûtra du Lotus.
En observant la disposition graphique du Gohonzon, on peut voir que Nam-myoho-renge-kyo – désigné dans cette lettre par « les cinq caractères du titre du Sûtra du Lotus » (Écrits, 839) – est inscrit au centre, entouré de chaque côté par des représentations de chacun des dix états5. Cela indique que les êtres vivants évoluant dans les dix états, à commencer par les bouddhas et bodhisattvas jusqu’aux représentations des états de vie inférieurs, sont tous représentés sans exception dans le Gohonzon, ce qui est parfaitement en accord avec le passage du chapitre « L’apparition de la Tour aux Trésors » du Sûtra du Lotus que cite Nichiren dans sa lettre : « [le bouddha Shakyamuni se servit de ses pouvoirs transcendantaux] pour faire s’élever dans les airs tous les participants de cette grande assemblée. » (SdL-XI, Écrits, 839) Ainsi, le Gohonzon inclut « tous les êtres de toutes sortes […] sans exception » dans les dix états. Il est la représentation de « la possession mutuelle des dix états », principe selon lequel tous les êtres vivants, une fois illuminés par la lumière de la Loi merveilleuse, peuvent révéler « les attributs de dignité qui leur sont inhérents ». (Écrits, 839)
Lorsque la lumière de la sagesse et de la compassion de la bouddhéité illumine les dix états dans notre vie, nous pouvons faire surgir le pouvoir de la bonté suprême et créer des valeurs durables. Cela signifie également que chaque personne peut alors rayonner en tant qu’entité de la Loi merveilleuse et révéler la dignité intrinsèque de sa vie.
Dans un tel monde, quels que soient leur situation personnelle ou le processus de transformation de leur karma, tous les individus brillent grâce aux « attributs de dignité qui leur sont inhérents ». Les personnes dans l’état d’enfer, par exemple, manifestent alors le monde de l’enfer contenu dans l’état de bouddha. Même si leur souffrance perdure, ce n’est pas une souffrance dénuée de tout espoir où elles errent, perdues, dans une obscurité sans fin. Elles peuvent faire apparaître à la fois le courage d’affronter des réalités difficiles, la sagesse permettant de surmonter les obstacles qui surgissent à l’intérieur comme à l’extérieur de leur vie, et la puissante force vitale pour parvenir à une nouvelle progression. Les souffrances deviennent des défis qui contribuent à notre transformation personnelle et à notre progression et constituent un tremplin vers un grand développement.
Lorsqu’il est illuminé par la lumière de la Loi merveilleuse, le noble état de vie qui ne fait qu’un avec la Loi merveilleuse opère avec dynamisme même dans l’état d’enfer. Le sens des souffrances de l’enfer change alors radicalement.
La vie de chaque personne incarne de manière inhérente les principes de « la possession mutuelle des dix états » et des « trois mille mondes en un instant de vie ». La vie de chaque personne est intrinsèquement parfaite et complète – il n’y a rien de superflu à retirer ni rien de manquant à ajouter. Aucune existence n’est exempte de joies et de peines, de hauts et de bas. Et, quels que soient nos efforts pour les éviter, nous ne pouvons échapper aux souffrances universelles de la naissance, de la vieillesse, de la maladie et de la mort.
La possession mutuelle des dix états est le véritable aspect de la vie, et le fait que chaque état possède en lui-même les dix états est une expression de la Loi merveilleuse. Le Gohonzon et notre foi nous permettent d’activer la Loi merveilleuse et de l’établir solidement comme socle de notre vie.
La disposition graphique du Gohonzon est fondée sur la réalité ultime de tous les phénomènes telle qu’elle est élucidée dans le Sûtra du Lotus. Elle clarifie le fait que, en tant que personnes ordinaires, nous pouvons faire surgir, sous notre forme actuelle, l’état de vie sans limites de la bouddhéité.
Un tel objet de vénération n’existait pas dans le bouddhisme. Il y avait de magnifiques représentations des bouddhas et bodhisattvas, qui prenaient des formes diverses, à travers des peintures et sculptures, mais aucun mandala incarnant le principe de la « possession mutuelle des dix états » pour permettre aux personnes ordinaires de parvenir à l’éveil n’avait été établi concrètement. Nichiren fut le premier à révéler le Gohonzon, capable d’illuminer les « attributs de dignité qui nous sont inhérents », à savoir l’objet de vénération pour l’éveil de toute l’humanité. Ce Gohonzon est véritablement le « “grand mandala” sans précédent » (Écrits, 839), qui dépeint le monde d’une religion inclusive et bénéfique à tous.
À l’époque de Nichiren – comme souvent encore de nos jours –, on retrouve la croyance solidement ancrée selon laquelle nous ne sommes que de petits êtres insignifiants, et que la réalité ultime, ou valeur immuable, s’incarne à l’extérieur de nous, dans un lieu très éloigné. Cette manière de penser est étroitement liée à la croyance en un pouvoir mystique surnaturel.
Cependant, le bouddhisme de Nichiren rejette cette idée et enseigne au contraire que la réalité ultime de la vie, dans laquelle la Loi éternelle et ultime est révélée, se manifeste dans la vie des personnes ordinaires ici et maintenant.
Le terme « bouddha », après tout, signifie l’« éveillé ». Or, à quoi s’est éveillé le Bouddha ? À ce qui devrait constituer le véritable fondement de notre vie – c’est-à-dire la Loi et la véritable nature de notre vie. Il s’est éveillé à la Loi universelle qui imprègne tous les phénomènes, recouverte auparavant par l’obscurité fondamentale6. Il s’est éveillé à la grandeur de la vie de chaque personne qui ne fait qu’un avec cette Loi.
Nichiren qualifie le Gohonzon d’« objet de vénération pour observer l’esprit ». (Écrits, 356) La raison d’être du Gohonzon est de nous permettre « d’observer notre esprit », c’est-à-dire de voir et de nous éveiller à la bouddhéité qui existe dans notre vie. Cependant, on ne peut percevoir la véritable nature de notre esprit, ou parvenir à l’éveil, par la méditation ou la pensée abstraite. L’essentiel est la foi. L’« objet de vénération pour observer l’esprit » est l’« objet de vénération de la foi ».
Le Gohonzon (la bouddhéité) se manifeste dans la vie de celles et ceux qui ont une croyance solide. Nous pouvons avoir le Gohonzon mais, sans la foi, nous n’obtiendrons aucun bienfait, car c’est la foi qui génère le « bouquet de bienfaits » (Écrits, 840), correspondant à la manifestation du Gohonzon dans notre vie7. Par conséquent, tant que notre croyance est active, ce « bouquet de bienfaits » ne disparaîtra jamais. Même s’il nous arrivait de perdre notre Gohonzon lors d’un accident ou d’un désastre naturel, tant que nous conservons notre croyance, le Gohonzon qui existe éternellement au cœur de notre vie demeurera intact, et nous pourrons en activer le pouvoir bénéfique.
Le pouvoir bénéfique du Gohonzon ne se manifeste que lorsque nous avons la foi. Le Gohonzon n’existe véritablement que dans notre seule foi.
D’après Shori no kyoten gosho ni manabu (Apprendre des Écrits de Nichiren : les enseignements pour la victoire), publié en japonais, décembre 2014
La Sagesse pour créer le bonheur et la paix est une compilation des écrits de Daisaku Ikeda sur une base thématique.
- *1Réalité ultime de tous les phénomènes : Vérité ultime ou réalité qui pénètre tous les phénomènes et n’est en rien séparée d’eux. En présentant cette vérité ultime sous la forme des dix aspects de la vie, le chapitre « Moyens opportuns » (2e) du Sûtra du Lotus enseigne que tous les êtres humains possèdent de manière inhérente le potentiel de devenir bouddha, et clarifie le fait qu’ils peuvent puiser dans ce potentiel et le manifester.
- *2Possession mutuelle des dix états (ou dix mondes) : Principe selon lequel chacun des dix états possède en lui le potentiel des dix états. La possession mutuelle signifie que la vie n’est pas fixée dans l’un ou l’autre des dix états, mais qu’elle peut manifester à tout moment n’importe lequel d’entre eux – de l’enfer à l’état de bouddha. Le point important dans ce principe est que tous les êtres dans n’importe lequel des neuf états possèdent la nature de bouddha. Cela signifie que chaque personne a le potentiel de manifester l’état de bouddha, mais aussi qu’un bouddha possède également les neuf états et, en ce sens, n’est pas séparé ou différent des personnes ordinaires.
- *3Trois mille mondes en un instant de vie : Système philosophique établi par le grand maître Tiantai en Chine, sur la base du Sûtra du Lotus. Les « trois mille mondes » correspondent aux divers aspects que la vie revêt à chaque instant. À chaque instant, la vie manifeste l’un des dix états (ou dix mondes). Chacun de ces mondes possède en soi le potentiel des dix, créant ainsi la possibilité de cent mondes. Chacun de ces cent mondes possède les dix facteurs et opère au sein de chacun des trois domaines de l’existence, ce qui conduit à trois mille mondes. En d’autres termes, tous les phénomènes sont contenus en un seul instant de vie, et un seul instant de vie pénètre les trois mille domaines de l’existence, c’est-à-dire le monde phénoménal dans son intégralité.
- *4Cérémonie dans les airs : Une des trois assemblées décrites dans le Sûtra du Lotus, au cours de laquelle tous les participants sont suspendus dans les airs, au-dessus du monde saha. Le cœur de cette cérémonie est la révélation de l’illumination originelle du Bouddha dans le très lointain passé et la transmission de l’essence du Sûtra aux bodhisattvas surgis de la Terre guidés par le bodhisattva Pratiques-Supérieures.
- *5Dix états (ou dix mondes) : Enfer, avidité, animalité, asura, humanité, bonheur temporaire, étude, éveil à la causalité, bodhisattva et bouddha. On parle aussi des dix mondes : les mondes de l’enfer, des esprits affamés, des animaux, des asura, des êtres humains, des êtres célestes, des auditeurs, des éveillés-à-la-causalité, des bodhisattvas et des bouddhas.
- *6Obscurité fondamentale : Inhérente à la vie, c’est l’illusion la plus profondément enracinée, qui engendre toutes les autres illusions et les désirs terrestres. Il s’agit de notre incapacité à voir ou à reconnaître la vérité, et en particulier la véritable nature de notre vie.
- *7Dans La composition du Gohonzon, Nichiren écrit : « Ne recherchez jamais ce Gohonzon en dehors de vous-même. Le Gohonzon n’existe que dans notre chair à nous, êtres ordinaires, qui adoptons le Sûtra du Lotus et récitons Nam-myoho-renge-kyo. Notre corps est le palais de la neuvième conscience, réalité essentielle qui règne sur toutes les fonctions de la vie. Que chaque être soit considéré comme doté des dix états signifie que tous les dix, sans aucune exception, sont contenus dans un seul état. Et si le Gohonzon est appelé mandala, c’est que mandala est un mot sanskrit que l’on traduit par “parfaitement doté” ou “bouquet de bienfaits”. Ce Gohonzon ne se trouve que dans les deux caractères “esprit croyant”. C’est ce que veut dire le Sûtra lorsqu’il déclare que “l’on ne peut accéder [à lui] que grâce à la foi”. » (Écrits, 840)