Partie 1 : Le bonheur. Chapitre 4
« C’est le cœur qui est important » [4.6]
4.6 Rester fidèle à son engagement dans la foi
Le président Ikeda souligne l’importance de la sincérité dans la foi, en prenant l’exemple du moine Sammi-bo qui, bien que connaissant parfaitement la doctrine bouddhique, succomba à l’arrogance et abandonna les enseignements de Nichiren.
Parmi les disciples de Nichiren se trouvait un moine du nom de Sammi-bo, lequel abandonna sa foi du vivant de Nichiren.
Il partit étudier au mont Hiei1 avec le soutien bienveillant de son maître. Un jour, il écrivit à Nichiren pour se vanter d’avoir répondu favorablement à une demande des nobles de la cour, qui souhaitaient qu’il expose la doctrine bouddhique dans un temple privé de la capitale impériale, affirmant qu’il s’était « conduit de manière parfaitement appropriée2 ». (cf.WND-II, 342) Nichiren répondit en le réprimandant sévèrement :
« Ceux qui exercent l’autorité au Japon ne sont que les dirigeants de ce pays insulaire. Dire, comme vous le faites, que vous avez été “sollicité” par des serviteurs de ces autorités pour vous présenter devant des “hauts dignitaires” et que vous vous êtes conduit devant eux de manière “appropriée” est, finalement, quelle que soit la manière de tourner vos propos, une insulte à mon égard, envers Nichiren ! » (WND-II, 342-343)
Le compte rendu que transmit Sammi-bo à Nichiren ne témoignait aucunement de sa fierté d’être son disciple ou de pratiquer l’enseignement suprême du bouddhisme. Tout en faisant preuve apparemment de respect envers Nichiren, Sammi-bo flattait servilement les puissants et, plein de suffisance, il méprisait en fait son maître. C’était un homme arrogant, ce que Nichiren discerna avec clairvoyance.
Voilà comment se comporta Sammi-bo envers son maître, qui avait tant fait pour lui et qui s’était évertué à lui enseigner, plus qu’à quiconque, l’essence même du bouddhisme. Sammi-bo était mû par son intérêt personnel et non par les enseignements de son maître. C’était quelqu’un d’égocentrique.
L’arrogance est une forme d’ingratitude, et l’ingratitude trahit une ignorance des principes fondamentaux de la vie. Sans cette compréhension des principes élémentaires, il est impossible de comprendre le bouddhisme. L’arrogance, la lâcheté et la malhonnêteté, tels étaient les principaux défauts de Sammi-bo.
Nichiren ajouta, encore plus sévèrement :
« Il semblerait que les disciples de Nichiren, une fois parvenus dans la capitale [Kyoto], se soient, au départ, efforcés de ne pas oublier leur intention première, mais, par la suite, égarés par le démon du ciel3, ils ont entièrement perdu la raison […].
« Ainsi, vous [Sammi-bo] vous êtes rendu dans la capitale et, peu de temps après, vous changez votre nom [pour qu’il ait l’air plus aristocratique], ce qui est d’une absurdité totale. » (WND-II, 343)
Nichiren déplore la vanité et la stupidité de son disciple, qui se mêle à la cour en oubliant sa détermination originelle d’approfondir la voie bouddhique, se dote d’un nouveau nom à consonance prétentieuse, et change jusqu’à son accent :
« Il ne fait aucun doute que vous avez aussi modifié votre manière de vous exprimer et que vous avez adopté l’accent de la capitale. De même qu’une souris transformée en chauve-souris ne peut être considérée ni comme un oiseau ni comme une souris, vous n’êtes désormais plus un moine de province pas plus que vous n’êtes devenu un moine de la capitale. Vous vous comportez exactement comme Sho-bo4.
« Vous devriez continuer de vous exprimer comme les gens de province, autrement vous vous ridiculiserez. » (WND-II, 343)
Avec cette seule phrase sur le fait d’adopter l’« accent de la capitale », Nichiren dévoile l’état d’esprit qui anime Sammi-bo : subjugué par le faste de Kyoto, il fut vaincu par les fonctions démoniaques de la vie.
Finalement, Sammi-bo renonça à sa foi dans les enseignements de Nichiren, il cessa de pratiquer et connut une fin de vie tragique.
Dans sa grande bienveillance, Nichiren eut plus tard cette réflexion : « Si je l’avais réprimandé encore plus sévèrement [Sammi-bo], il aurait peut-être été sauvé. » (Écrits, 1009) Cela démontre que corriger sévèrement les personnes qui tombent dans l’arrogance est la meilleure façon d’agir. Cela nécessite une grande bienveillance, et c’est parfaitement en accord avec l’esprit de Nichiren.
Nichiren déclara fièrement, au sujet de lui-même : « Je ne suis que le fils d’un roturier d’une province éloignée. » (Écrits, 1017) Il affirma ne pas être issu d’une lignée ou d’une famille privilégiée, mais d’origine modeste. Il n’en avait pas honte, au contraire, il en était fier.
Comme il était né parmi les personnes ordinaires, il comprenait leur cœur. S’il avait été issu d’un milieu privilégié ou de haut rang, il aurait été protégé par les autorités et n’aurait jamais connu les dures persécutions qui jalonnèrent sa vie. En tant qu’enfant du peuple, Nichiren vécut parmi les gens ordinaires. Il comprenait et partageait leurs souffrances comme si c’étaient les siennes, et il propagea largement son grand enseignement deNam-myoho-renge-kyo pour les soulager de leurs souffrances. À travers son existence, il enseigna et montra par son exemple aux générations futures la véritable voie pour réaliser kosen rufu.
M. Toda déclara que le niveau d’étude n’avait rien à voir avec la foi. Bien entendu, il accordait la plus grande valeur à l’éducation, aux études et à l’apprentissage, mais il nous adressa aussi cette mise en garde : si des individus, persuadés que leur niveau académique et intellectuel les rendait meilleurs que les autres, devenaient responsables de la Soka Gakkai, les pratiquants ne les suivraient pas – avec de tels responsables, ils ne pourraient que souffrir.
Les enseignements de Nichiren sont justes et rigoureux. Nichiren cite les mots « Puisque la Loi est merveilleuse, la personne qui l’adopte est digne de respect5 ». (Écrits, 1104) Et il écrit aussi : « Par conséquent, si la Loi à laquelle on adhère est suprême, alors la personne qui la pratique doit être, elle aussi, la plus grande de toutes ». (Écrits, 62)
Les personnes œuvrant pour kosen rufu sont infiniment nobles. Ceux qui font preuve de ténacité pour transmettre la Loi merveilleuse, même dans les périodes difficiles, sont véritablement admirables. Sortir d’une école prestigieuse ou avoir une position sociale élevée n’ont absolument rien à voir avec la foi.
Les diplômes et autres titres académiques ne déterminent pas la grandeur ou l’intelligence. Le bouddhisme concentre son attention sur la personne elle-même.
D’après un discours donné lors d’une conférence des représentants de l’agglomération de Tokyo, Tokyo, le 19 mai 2007
La Sagesse pour créer le bonheur et la paix est une compilation des écrits de Daisaku Ikeda sur une base thématique.
- *1Mont Hiei : Emplacement du temple Enryaku-ji, temple principal de l’école Tendai (Tiantai) et centre majeur de recherches sur le bouddhisme en ce temps-là au Japon. Il est situé au nord-est de Kyoto, à l’époque capitale impériale.
- *2La phrase traduite ici par « conduit de manière parfaitement appropriée » suggère une disposition d’esprit où l’auteur se félicite d’avoir fait du bon travail et d’être ainsi parvenu à renforcer sa réputation.
- *3Démon du ciel : Aussi appelé Roi-Démon du sixième ciel. Roi des démons qui réside dans le plus élevé des six cieux du monde du désir. Il est également connu sous le nom de « roi-démon du Ciel où l’on jouit librement du fruit des efforts des autres », le roi qui exploite ouvertement le fruit des efforts d’autrui pour son propre plaisir. Avec d’innombrables laquais à son service, il s’applique à entraver la pratique bouddhique et prend plaisir à miner la force vitale des autres êtres, ce qui dépeint la manifestation de l’obscurité fondamentale inhérente à la vie. Le Roi-Démon est la personnification de la tendance négative consistant à forcer les autres à agir en fonction de ses propres intérêts, quoi qu’il en coûte.
- *4Sho-bo : Bien que disciple de Nichiren, il abandonna sa foi dans les enseignements de son maître au moment de l’exil d’Izu en 1261, et finit par se retourner contre lui. Selon les sources, il serait décédé vers 1269.
- *5Tiantai, Commentaire textuel du Sūtra du Lotus.